L' esprit du judaïsme
L'esprit du judaïsme
par Bernard-Henri Lévy
"J’ai lu le dernier livre de BHL"*
par Yona Ghertman
Dur dilemme pour un rabbin intéressé par le monde qui l’entoure… Voilà qu’un célèbre écrivain se proclamant « juif laïque » présente son dernier ouvrage en glorifiant l’étude du Talmud, et en célébrant le credo du « naassé vénichma », voulant qu’une pratique scrupuleuse des lois juives (mitsvote) précède nécessairement la compréhension du message divin…
Que ce soit sur un plateau de télévision ou dans les Synagogues qui l’invitent, Bernard-Henry Lévy discourt sur l’identité juive, raconte des anecdotes sur des illustres figures rabbiniques, et démontre son habilité à extirper des idées fortes du texte biblique qui le passionne. Dilemme donc. D’un côté cette sévérité de nos maîtres à l’égard de celui dont l’enseignement ne reflète pas son intériorité (TB Yoma 72b) … Mais de l’autre… cette sentence de Maïmonide qui résonne lorsque je lis L’esprit du judaïsme : « Accepte la vérité de quiconque l’a énoncée » (introduction au Traité des huit chapitres).
Parmi les thématiques abordées, certaines sont davantage liées à la politique et à la sociologie qu’à la Torah. D’autres, au contraire, sont profondément liées au texte, allant jusqu’à analyser pourquoi tel mot hébreu est employé à tel endroit, et ce malgré l’aveu de l’auteur quant à son balbutiement dans la langue de l’étude. On peut critiquer son lyrisme quelque-peu surfait, le choix d’enfoncer certaines portes ouvertes dans la communauté juive en insistant sur l’antisémitisme, ou sur sa propre perception de l’Islam… Mais ma principale critique concerne le traitement des sources. Le récit mêle (volontairement ?) la littéralité du texte (pchat) et son exégèse (drash). Les références ne sont -quasiment- pas citées. Le « je » de BHL suffirait-il à assurer une légitimité à son traitement de la littérature rabbinique ou des écrits philosophiques évoqués ? Ce n’est plus tant le rabbin qui est alors heurté, mais l’universitaire, habitué au référencement systématique et à l’exigence de rechercher l’écrit dans son contexte originel.
Je découvre néanmoins des commentaires intéressants : une belle comparaison entre les descendants légitimes d’Abraham et les grains de sable se déplaçant continuellement, symbolisant le peuple juif et ses errances qui le caractérisent (pp.246-247) ; une description de Kora’h comme le symbole du juif orgueilleux, persuadé à tort que son statut de « peuple trésor » le place de facto au-dessus des autre (pp.252-260) … On plonge en outre dans les rencontres, presque intimes, entre Bernard-Henry Lévy et certains intellectuels français -juifs ou non- notamment avec Benny Lévy, dont l’influence, assumée, se ressent fortement. On reste perplexe du parallèle entre l’histoire du prophète Jonas (Yona) contraint de s’ouvrir à une nation étrangère, à terme dangereuse pour le royaume d’Israël ; et les pérégrinations de l’auteur en Ukraine ou en Lybie, avec la volonté de soutenir les populations locales (2nde partie) … Perplexe, mais intéressé, car s’il n’est pas nécessairement convainquant, le lien entre l’étude approfondie du livre biblique et l’actualité interpelle.
Enfin, la lecture des dernières pages du livre me fait penser que cet homme, sans doute de bonne foi, se réfugie dans l’analyse du rapport à l’autre, pour ne pas se confronter à son propre rapport au judaïsme. Puis je découvre que BHL me donne lui-même raison, alors qu’il prête à ses aïeux disparus ce propos fictif à son égard : « Tu as voulu repêcher bien des gens. Nous voulons maintenant que tu te repêches toi-même » (p.433). Troublant.
*D'après un billet paru dans l'hebdomadaire "Actualité Juive", en date du 31 Mars 2016
Date de dernière mise à jour : 31/03/2016
Commentaires
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- 1. Yeho Le 26/04/2016
BHL se prend pour Yonah, le seul prohete d'Israel qui a prophétisé auprès des nations. Comme lui, il s'est adressé à ceux qui voulait détruire Son peuple.
Que reste-t-il de cela ? Les régimes d'Irak, d'Afghanistan, de Syrie et de Lybie ont été balayés les uns apres les autres.
Aujourd'hui, Israel est plus fort que jamais, bientot la moitié du peuple juif sera en Israel ce qui permettra l'établissement du sanhedrin et du Yovel.
Et BHL dans tout cela?
il s'est regulierement trompé mais il le raconte avec un tel panache qu'on l'oublie. Si ces rappels à la l'etude sont interessants, il n'a pas l'etoffe d'un Benny Levy mais s'il rappelle à plusieurs reprises la creation de l'institut de Jerusalem.
Mais tout homme, a à chaque instant l'instant de changer de voie et de transcender sa destinée. meme celui qui a épousé dans une eglise, un shabbath, une femme qui portant une grande croix d'or.
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