Projet Ramban - Réeh

       PROJET RAMBAN* SUR LA PARACHA    

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De l’efficacité des divinations autour du sang (Ramban/Rambam)

 

« Seulement sois fort pour ne pas manger le sang, car le sang c’est la vie, et tu ne mangeras pas la vie avec la chair » (Devarim 12, 23)

 

Après un long développement sur l’interdit de consommer du sang, répété plusieurs fois dans la Torah, le Ramban aborde une question classique chez les commentateurs : Pourquoi la Torah estime-t-elle que le respect de cet interdit nécessite une si grande force morale ? Fidèle à sa démarche, le maître explicite le questionnement en s’appuyant sur une analyse globale du texte : « Nous trouvons cette expression de ‘force’ dans les mtisvote lorsque Dieu a dit à Yeochoua : ‘Seulement sois très fort et courageux pour garder et accomplir toute la Torah que J’ai ordonnée à Moshé mon serviteur’ (Yeochoua 1, 7) ; et de même Yeochoua s’est-il exprimé envers Israël (…). Toutefois dans le cadre d’une mitsva, on ne trouve pas une telle formulation [sauf en l’espèce] (…) ».

Dans un premier temps, c’est la thèse du Rambam dans le Guide des Egarés (3, 46) qui est citée et suivie : La consommation du sang des animaux offerts aux démons était une pratique si courante en Egypte que les Hébreux l’avaient complètement intégrée[1]. Il fallait donc une insistance toute particulière pour que cette pratique cesse.  

Cependant cette raison n’est pas suffisante selon le Ramban. Il rappelle tout d’abord que la suite du verset apporte une justification à la mitsva : « car le sang c’est la vie ». Puis il explique que l’association aux démons par la consommation du sang avait un objectif précis : ce procédé permettait de dévoiler l’avenir. Là était le risque et la motivation de l’insistance : que les spectateurs de la réalisation d’une prédiction annoncée ‘autour du sang’ n’en viennent pas à en faire de même puis à délaisser Dieu. Au contraire, il convient de marcher toujours avec Dieu sans écouter les diseurs de bonne aventure et autres faux prophètes… même si les ‘prophéties’ et autres divinations peuvent se réaliser.

Bien que le Ramban incite finalement à ne pas suivre ces pratiques « qui ne sont que vanité et illusions », il laisse pourtant entendre que leur efficacité peut être réelle. Une telle ambigüité se retrouve également chez le Rambam. Dans le passage du Guide précité, il rappelle que la croyance dans le pouvoir de la divination autour du sang était très répandue, mais il ne la réfute pas explicitement. Il laisse d’ailleurs entendre le contraire dans les Hilkhote issodé haTorah (10, 3) : « Certaines prophéties prononcées par des devins, sorciers ou autres se matérialisent, d’autres non (…) ». Or dans les Hilkhote ‘avoda zara (11, 16), le discours est tout autre : « Quiconque croit aux [arts occultes] de cette nature et pense qu’ils sont vrais (…) est sot et faible d’esprit ».

Certes, on oppose habituellement les deux maîtres sur la question de l’efficacité réelle des ‘forces impures’ attribuées aux procédés de sorcellerie[2]. A la lecture des sources citées, on peut toutefois s’interroger sur la légitimité d’une telle catégorisation…

 

Yona GHERTMAN

 

 

* Moché ben Na'hman (Na'hmanide), Gérone 1194- Acre 1270

Texte original :

 

רמב"ן דברים פרק יב פסוק כב
מה חוזק ואומץ יש בהזהר מן הדם, והראוי שיאמר לחומרו "השמר לך לבלתי אכול הדם". ומצינו לשון חוזק במצות, שאמר הקדוש ברוך הוא ליהושע (יהושע א ז) רק חזק ואמץ מאד לשמור לעשות ככל התורה אשר צוך משה עבדי, וכן אמר יהושע לישראל (שם כג ו) וחזקתם מאד לשמור ולעשות את כל הכתוב בספר תורת משה, וזה במצות כולן, "ולשמור" ירמוז ללא תעשה "ולעשות" ירמוז למצות עשה, אבל במצוה אחת לא נמצא כן, ומה צורך לחיזוק בשב ואל תעשה ממצות לא תעשה אחת:
אבל נראה לי כי הזכיר בה חיזוק מפני הענין אשר ממנו דבקו בדם במצרים, כי היו זובחים את זבחיהם לשעירים תמיד כמו שכתוב (ויקרא יז ז) ולא יזבחו עוד את זבחיהם לשעירים אשר הם זונים אחריהם, וכתיב (להלן לב יז) יזבחו לשדים לא אלוה, והיתה העבודה ההיא באכילה מן הדם, כי היו מקבצים הדם לשדים והם אוכלים עליו וממנו, כאלו הם קרואים לשדים לאכול על שולחן השדים ההם ומתחברים עמהם, וכבר הוזכר זה בספר מורה הנבוכים (ג מו). ולא שיהיה זה עיקר טעם איסור הדם, כי הכתוב מפרש טעמו כי הדם הוא הנפש - כאשר בסדר אחרי מות (ויקרא יז יא), אבל מזה היו שטופים בו ורודפין אחריו מאד. והנה היו מתנבאים בו ומגידים עתידות. ולכך בא הכתוב והזהיר שאם ישמע מאוכלי הדם דבר עתיד ובא האות והמופת אל יפתה לבבו, אבל יחזיק בתומתו ובאמונת ה' ואל יאכל מן הדם בשום ענין, ואל יכסה המעשה ההוא, מדבריהם לא יירא ומפניהם לא יחת כי הבל המה מעשה תעתועים. הזהיר בכאן כענין המוזהר בנביא השקר מפני הטעותיו: 


[1] Dans le Guide, le Rambam distingue entre deux cultes proches : ceux qui mangeaient le sang pour s’allier aux démons ; et ceux qui ne supportaient pas la consommation du sang et se contentaient de manger la chair de l’animal sacrifié auprès de son sang (Ibid.).

[2] La thèse du Rambam rapportée à cet effet est notamment celle citée dans les Hilkhote ‘Avoda Zara. Quant au Ramban, il développe explicitement dans son commentaire sur Devarim 18, 9-12 une argumentation destinée à prouver la réelle efficacité des arts occultes.

 

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